lundi 22 avril 2024

Incandescentes

 


Nous sommes dans le courant du 19ème siècle dans ce qui était alors la Prusse, un royaume désormais démantelé du nord-est européen.

Dans un tout petit village vivent quelques familles protestantes archi-pieuses et résistant tant bien que mal à un protestantisme moins exigeant. Entre la Bible, la morale, et les corvées familiales, il n’y a guère de distractions. L’avenir des filles est dans le mariage, la maternité et surtout la piété, l’obéissance et la sagesse. Hanne est adolescente à cette époque, elle a du mal à trouver sa place dans cette société étriquée et rigoriste ; elle peine à intégrer le destin que sa famille lui promet.

Sauf qu’un jour, arrive dans le village Thea et sa famille arrive au sein de cette communauté. Et c’est le coup de foudre…Deux âmes sœurs !

A cette époque, les luthériens sont persécutés par les calvinistes, et à la faveur d’une décision du Roi de Prusse, les luthériens sont autorisés à émigrer. Ce sera l’Australie où les luthériens décident de tout quitter pour aller y fonder une colonie où ils pourront vivre leur foi comme ils l’entendent.

Le roman se passe à la fois en Prusse, en mer puis en Australie. Mais l’originalité réside dans le fait que la narration se fait à deux voix ; celle d’Hanne dans un premier temps, puis celle de son fantôme dans un second temps. On passe de l’une à l’autre sans effort d’adaptation, presque naturellement.

Hannah Kent aborde sous deux angles la passion, les amours interdites, l’emprise biblique, la laborieuse conquête du nouveau monde et de la liberté.

On quitte difficilement les personnages décrits avec acuité, tant l’écriture de ce roman est lumineuse.

Incandescentes d’Hannah Ket, traduit de l’australien (anglais) par Sarah Tardy aux éditions Presses de la cité.

Hannah Kent est une auteure australienne.

Elle a fréquenté la Heathfield High School et a obtenu son doctorat (Ph.D.) de création littéraire à l'Université Flinders à Adélaïde, où elle a également donné des cours d'anglais et d'écriture.

En 2010, Hannah Kent est cofondatrice et rédactrice en chef de la revue littéraire australienne "Kill Your Darlings".

Elle s’est fait connaître avec "À la grâce des hommes" ("Burial Rites", 2013), son premier livre, basé sur une histoire vraie, salué dans le monde entier par une critique unanime et couronné de plusieurs prix littéraires.

"Incandescentes" ("Devotion", 2021) est son troisième roman après "Dans la vallée" ("The Good People", 2016). Pour l'auteure, c'est "un retour à la lumière après deux livres axés sur l'obscurité".

Depuis 2021, Hannah Kent vit à Adélaïde avec sa femme et leurs deux enfants.

vendredi 19 avril 2024

L'île haute

 

Quel bonheur de retrouver Valentine Goby, qui à chaque nouvel opus, parvient à se renouveler, et me surprendre.

Valentine Goby aime la montagne, la pratique assidûment, et s’en inspire ici en installant immédiatement une impression qui engage tous les sens.

Vadim est un jeune parisien de douze ans que sa famille envoie prendre le bon air de la montagne pour soigner son asthme. On découvrira au fil des pages que les choses sont un peu plus compliquées que cela. Nous sommes en 1942….

Vadim est accueilli à la ferme loin de la ville, avec les sommets face à lui. Et puis il a Moinette, qui va devenir sa grande copine. Ainsi, Vadim, rebaptisé Vincent, traversera trois saisons, où la montagne offrira ses trois couleurs : le blanc hivernal, le vert du renouveau printanier, et le jaune estival, qui serviront d’architecture à ce roman initiatique.

Tout, à mon humble avis, repose sur la prose poétique et ciselée de Valentine Goby qui fait des montagnes un autre personnage de ce roman qui invite le lecteur à rentrer subtilement dans l’intimité de ce jeune garçon et de sa famille alors que la chasse aux juifs bat son plein.

Valentine Goby sème ici ou là une multitude d’évocations de ses précédents romans, tout en nous proposant quelque chose de nouveau et de particulièrement émouvant.


L’île haute de Valentine Goby aux éditions Actes Sud (Août 2022, 270 pages)